Avant les fêtes, je vous propose de traverser l’Atlantique tout en restant en France, à travers deux expositions situées dans le quartier parisien du Marais. La première – accrochée à la POLKA GALERIE – nous emmène au Canada pour découvrir les regards croisés du cinéaste Wim Wenders et de son épouse Donata. La seconde exposition – située à la NEXTLEVEL GALERIE – exposait des extraits de la série « Country limit » de Ronan Guillou, travail inspiré de l’univers visuel de Wim Wenders. Cette seconde exposition vient de se terminer, mais vous pouvez toujours vous offrir le livre « Country limit », commenté en fin d’article.
« Places of the mind » : regards croisés de Wim et Donata Wenders à Polka Galerie
« Places of the Mind » est un projet construit autour des derniers travaux respectifs de Wim et Donata Wenders. Ce travail met en lumière certaines facettes de leur collaboration artistique, si particulière. Tout se passe entre 2011 et 2014, dans les lieux qui ont inspiré le cinéaste pour réaliser son dernier film « Every Thing Will Be Fine ». Le grand réalisateur des « Ailes du désir », de « Paris Texas », de « Buena Vista Social Club », est « d’abord et avant tout un photographe » dixit Alain Genestar (Directeur de Polka Magazine).
Le réalisateur du film « Le Sel de la terre » – dédié au travail de Sebastiao Salgado (lire mon article précédent) – voue une passion aux lieux et aux paysages. Ses photographies montrent des paysages éphémères et malicieux, avec toujours en filigrane, les hommes qui les ont habités ou visités. Il réalise ses photos lors de repérages. Sa femme, elle, se concentre sur les faits et gestes du tournage.
D’abord photographe de plateau, elle a dirigé son objectif sur James Franco, personnage principal du film de Wim, qui joue un écrivain. Entre les prises, l’acteur ne cesse de lire. Donata décide alors de le photographier lorsqu’il est plongé en pleine lecture. Cette production a donné naissance à une série de tirages capturant la présence mystérieuse de « l’acteur-lecteur », ainsi qu’à un court métrage original : « James Reading – Reading James ». Ce film – accompagné par la musique de Laurent Petitgand – instaure un dialogue visuel entre l’acteur et la photographe, un assemblage énigmatique à la fois intime et distancié : James lisait et Donata lisait James. Ce petit film est agrémenté d’une série de tirages de l’artiste.
Les deux photographes, mènent chacun leur travail de manière bien distincte, et se livrent ainsi à une jolie conversation qui reflète leur but commun, extraire l’essence fondamentale de leur sujet. Places of the Mind sera visible de nouveau après les fêtes jusqu’au 9 janvier.
« Country limit » de Ronan Guillou à Next Level Galerie
Les images en couleur de Wim Wenders inspirent clairement le travail de Ronan Guillou qui exposait ses travaux extraits de la série « Country limit » à la NEXTLEVEL GALERIE. Rien de vraiment surprenant quand on sait que le photographe a découvert la photographie par le cinéma, en particulier après avoir vu le fameux « Paris Texas » de Wenders.
Le titre de cette dernière série réalisée aux Etat-Unis entre 2011 et 2013 fait référence au signe « City Limit », visible à l’entrée de chaque ville américaine. Elle réunit des vues de paysages où l’empreinte de l’activité humaine est manifeste et des images d’américains dans leur environnement propre. La série parle du lien de l’homme à son territoire et tend à témoigner de la fragilité d’une certaine Amérique.
Ronan Guillou a entrepris ses premières investigations photographiques personnelles dans les espaces urbains américains. Les Etats-Unis sont devenus peu à peu le sujet principal de ses travaux, odyssée en couleurs à travers l’Amérique de ce début de millénaire. Privilégiant pour son récit photographique le hasard, la rencontre et le désir d’expérience, les explorations du photographe le mènent à observer et ausculter cette Amérique qui fascine, où fiction et réalité entretiennent une relation singulière. Un livre vous permet de vous plonger dans cet univers et de prolonger l’expérience. (Pour approfondir le sujet vous pouvez aussi lire cet article).
Les livres accompagnant ces 2 expositions
Quelques mots de Michel Poivert (historien de la photographie), évoquent parfaitement le livre de Ronan Guillou : « Avec Country Limit, Ronan Guillou a particulièrement cherché à dépasser la tradition du livre de voyage ou du journal intime. Il s’agit surtout de tenter un dialogue avec la photographie américaine et à travers elle de dépeindre les États-unis tels qu’ils apparaissent en ce début de XXIe siècle.» (…) «La photographie américaine est devenu un art du XXe siècle. Aller se mesurer au genre revient pour Ronan Guillou à explorer le thème qui structure toute la photographie américaine : le Temps. Signifié comme l’exploration d’un espace, Country Limit s’inscrit dans la poétique de la temporalité. »
Un portfolio de 10 images de « Places of the mind » est disponible dans le coffret Womblat numéro 20.