– La lauréate du concours PORTRAIT(S) –
Exposée à Vichy jusqu’au 9 septembre
A l’occasion de l’exposition de sa série « Seule avec toi » autour de la gémellité, Julie Plus et Thierry Bouët ont rencontré Héloïse Berns, lauréate du concours PORTRAIT(S).
Julie Plus : Quelle est l’histoire de la série ?
Héloïse Berns : C’est l’histoire de mes jumelles, j’avais deux enfants et puis je suis tombée enceinte de jumelles. Elles ont 17 ans maintenant. Quand elles avaient 11 ans, j’ai quitté leur papa et je me suis remise à la photographie. J’ai recommencé une série sur elle, en format carré, pour essayer de comprendre leur relation.
JP : Est-ce que ça t’a aidé à les comprendre ?
HB : Oui, ça m’a aidé à accepter leur relation. C’est quelque chose qui perturbe une famille. Elles ont une relation extrêmement forte, très fusionnelle, à l’amour, à la haine donc ça part dans tous les sens. Elles ont une manie de traiter les autres un peu comme elles se traitent entre sœurs. Du coup, on est décalé, en tant qu’individu, on ne comprend pas cette relation. Je vois aussi, au niveau du frère aîné et de la sœur aînée, ils ont souffert de la place qu’elles prenaient. On n’entend qu’elles, on ne voit qu’elles alors que lorsqu’elles sont seules, elles reprennent une place d’individu.
JP : Elles sont tout le temps ensemble ?
HB : Presque, sauf pour le sport, l’une fait de la gymnastique et l’autre de l’athlétisme. Elles ne sont plus dans la même classe aussi.
JP : Elles sont fières des photos tes filles ?
HB : Oui, elles pensent qu’elles vont être connues… mais non. Ce qui est assez marrant c’est quand elles sont dans les expos avec moi, ce qui arrive parfois, les gens sont perturbés parce qu’ils les voient pour de vrai et puis ils voient les photos…
JP : Tu continues à photographier tes filles ?
HB : Seule maintenant. Mais elles m’ont quand même dit « maman on aimerait bien que tu reprennes la série », mais peut être pas maintenant, il y aura peut-être d’autres moments dans leur vécu, dans leur relation à elles où ce sera intéressant de les photographier.
JP : Quelle est ton histoire ? Tu es photographe de formation ?
HB : Oui, je suis photographe de formation. J’ai travaillé 3/4 ans dans la photo après mes études d’architecture… Et puis on se marrie, on a des enfants, j’ai vécu à l’étranger pendant 15 ans donc j’ai arrêté. Ensuite, j’ai rencontré un artiste qui m’a un peu encouragé. Mais c’était aussi un besoin pour moi, j’ai recommencé avec l’autoportrait pour me retrouver. Ensuite j’ai photographié mes filles, de 11 à 16 ans.
JP : Peux-tu raconter ta relation avec Wipplay ?
HB : C’est Vichy qui m’a amené à Wipplay. J’ai connu le festival de Vichy il y a peut-être 4 ans. Il y a 3 ans, j’avais envoyé la série « Seule Avec Toi » à Vichy, mais c’était peut-être trop tôt, je l’ai reconstituée ensuite, je me suis arrêté à 19 photos. Et puis j’ai vu que le concours PORTRAIT(S) se faisait aussi via Wipplay, c’est comme ça que j’ai participé. Des sites comme Wipplay te donnent une visibilité supplémentaire…
JP : Quels sont tes photographes de références ?
HB : Ma première photographe de référence c’est Diane Arbus et puis Richard Avedon…
JP : Au jury, ces références étaient aussi sorties, c’est marrant !
Thierry Bouët : Tu as choisi de raconter un peu l’histoire des jumeaux, pourquoi tu as choisi la photographie comme support ?
HB : Je suis photographe, c’est ma manière de transcrire mes émotions. Cela passe par l’image. Je me suffis à l’image fixe. Même si parfois, je peux être frustrée.
TB : Et pourquoi pas l’écriture ?
HB : Je n’ai pas le temps et puis l’image laisse encore rêver, je peux imaginer des choses… Peut-être plus qu’un texte écrit. Mon père et mon frère sont philosophes, mais mère écrit aussi… C’est donc souvent mon frère qui écrit les textes pour moi. Je suis très frustrée de ne pas écrire.
TB : Quel regard portent-ils sur ton médium ?
HB : Ça me surprend de dire ça, mais ils ont un regard relativement admiratif parce que je suis sortie de cette écriture. J’ai l’impression qu’ils comprennent ce média et mon travail qui oscille entre poésies et le documentaire.