Vous avez jusqu’au 14 décembre pour participer au concours NOIR(S). Pour vous souffler de nouvelles inspirations, nous nous penchons sur les travaux de nos deux photographes jurés au concours : Albin Millot et Stéphane Lavoué. Deux regards qui se posent sur le noir, à travers des univers particuliers mais une vision commune, volontaire et altruiste.
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Albin Millot,
le paysage pour questionner humain.
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Albin Millot est un photographe français basé à Paris. Ses projets, livres et expositions au long cours explorent les relations de l’être humain à son environnement, sauvage et à la fois urbain. Les frontières, de formes diverses, géographiques, psychiques, la liberté des mouvements et des migrations, sont des thèmes récurrents dans ses recherches. La photographie de paysage est la forme de photographie qu’il utilise principalement pour cela.
“Ma photographie navigue entre travail institutionnel, commandes et publications, et une approche esthétique proche du documentaire. Elle m’aide à saisir la relation que l’humain entretient avec ses éléments environnants, la ville, la nature ; et me donne ce recul nécessaire pour comprendre les interactions d’homme à homme.”
Le noir, comme vecteur d’émotions
« Des projets plus personnels, aux univers plus oniriques, comme une alternative créative d’autres sentiments, me permettent en parallèle de manipuler ces ressentis, les questionner, changer d’angle de vue et ainsi me les ré-approprier. »
Pour contempler les images d’Albin Millot, il faut prendre son temps, le ralentir même. Ses images laissent émerger des émotions qui viennent d’elles-mêmes. Sombres, noires, floues, les clichés suggèrent le retour sur soi.
« J’utilise le sténopé pour mes travaux personnels, qui touchent à l’intime. L’esthétique très dense qu’il offre correspond pour moi à l’idée d’inconscient, d’incursion au fond de soi. Quand je photographie au sténopé, je le tiens contre ma poitrine. On respire ensemble et il prend son autonomie, comme un cerveau débranché, capteur de photons, de lumière, mais aussi de sensations qui, ensuite, ressortent sur le papier. »
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Stéphane Lavoué,
des portraits pour conter des histoires
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Stéphane Lavoué est photographe, né en 1976 à Mulhouse. Collaborant pour la presse à l’origine, il travaille pour Libération à partir de 2001, puis se spécialise dans le portrait. Ses travaux sont publiés par Le Monde, Le Figaro, L’Équipe, New York Times, The Times.
“Au bout de quelques temps, j’ai commencé à me lasser du reportage politique pour la presse : j’étais frustré de voir qu’une seule photographie allait être publiée alors qu’une histoire se construit à travers plusieurs images. A partir du moment où j’ai commencé à faire du portrait, je n’ai pratiquement plus fait que cela. Dans ces rencontres, j’ai trouvé une intensité, une tension, une satisfaction – quand j’arrivais à sortir une bonne image – qui m’a passionné. »
Contrairement au reportage où de longues attentes sont souvent à prévoir et où l’on est contraint d’aller à « la pêche à l’image », le portrait est un rendez-vous fixé au préalable. Le photographe dispose alors de vingt, trente minutes, une heure, dans le meilleur des cas. Dans ce laps de temps, dans cette unité de lieu et de temps, il faut alors réussir à sortir une image.
Le noir comme lumière picturale
“Je suis parti de la lumière des peintres. Au départ, quand j’ai démarré le portrait, j’adorais les jours de pluie, la lumière très douce, diffuse, qui n’est pas agressive et qui vient découper le visage. C’est plutôt une lumière du nord, celle des peintres hollandais… J’ai essayé ainsi de la décliner en éclairage artificiel. Toutefois, ce n’est qu’avec l’expérience que l’on réussit à affiner le positionnement de l’éclairage : pour obtenir quelque chose de rond, de doux et, à la fois, pouvoir se focaliser sur la personne, cela peut se jouer à une distance infime, de deux à trois centimètres.”
Stéphane Lavoué ne travaille pas en lumière naturelle, il travaille en lumière artificielle, en flash. « Cela permet de circonscrire la scène physiquement, avec des torches qui créent un espace dans lequel la personne va se sentir un peu enfermée. »
Ses images dessinent un paysage intime, brossé par la lumière, le clair-obscur et un regard qui après vous avoir saisi, vous plonge dans le silence. Ces séries se construisent comme un récit, une fresque, à la fois poétique et épique. Son travail pictural nous invite à nous plonger dans des univers sublimes, mais aussi à l’intérieur de soi. Tout comme Pierre Soulages, Stephane Lavoué joue de la lumière pour écrire son noir.
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