Elliott Verdier – deuxième prix du jury du concours Portrait(s) – a capturé des portraits d’ouvriers, d’étudiants, de vieillards mais aussi les paysages des villages oubliés du Kirghizstan. Il nous raconte l’origine du projet « A Shaded Path ». Sa série sera exposée du 30 Juin au 28 juillet à l’espace Andrée Chedid d’Issy-les-Moulineaux et fera l’objet d’une publication.
Quelle est l’origine de ce projet photographique ? Comment avez-vous découvert cette région du Kirghizstan ?
Suite à un reportage fait en Mongolie, je m’intéressais de plus en plus à l’Asie Centrale. En me documentant sur la région, j’ai découvert le Kirghizstan. J’ai un peu honte, mais je n’en avais réellement jamais entendu parlé ! Les zones en marge, dont on entend peu de nouvelles, m’ont pourtant toujours attirées. C’est comme ça que ma curiosité sur le pays est apparue. J’ai fais un premier voyage d’un mois en juin 2016, puis, constatant la possibilité d’y faire un projet, j’y suis retourné quelques mois plus tard d’octobre à février. Je ne savais pas quel sujet vraiment traiter, c’est une fois sur place que les choses ont commencé à dessiner « A Shaded Path ».
Quelle est l’obsession photographique que l’on retrouve au fil de ce projet ?
En tant que photographe, j’ai le désir d’arrêter le temps pour conserver et constituer une mémoire des choses, généralement des personnes en marges, anonymes, et des lieux qu’ils occupent. J’aime apporter sur eux une lumière, une trace de leur passage, partageant un instant gelé pour toujours. Le temps est un élément clé de mon travail, et par association, la mémoire également.
Je privilégie des sujets généralement loin de l’actualité chaude, et prends le temps de les découvrir, d’entrer dans l’intimité des gens. C’est par ce biais que je nourris ma quête de la beauté, à travers eux, leur nostalgie, leur mélancolie et leur sensibilité. Dans ce dernier projet, j’ai vécu quatre mois au Kirghizstan pour documenter deux générations, l’une plus âgée encore nostalgique de la période soviétique, et l’autre plus jeune, occidentalisée et moderne, cherchant à construire un pays encore sous les radars, qui peine à se définir une identité nationale dans le monde globalisé. Plus largement, j’aimerais que mon travail soit perçu comme une douce lutte existentielle.
Quelle lumière berce vos projets ?
Je travaille uniquement avec la lumière naturelle, parfois aidée d’un réflecteur. Elle occupe une place primordiale dans mon travail car à mon sens, c’est elle qui donne le ton aux images, et la série plus généralement.
Quelles sont vos actualités dans les prochains mois ?
Voilà plus d’un an que je suis rentré du Kirghizstan et « A Shaded Path » a été publié de très nombreuses fois, exposé en galerie ou lors de divers festivals, et récemment publié en monographie. C’est un projet qui a bien vécu et j’aimerais pouvoir aujourd’hui produire quelque chose de nouveau, notamment au Libéria où je désire mener un projet à la sensibilité et aux thématiques similaires, tout en dissipant davantage la frontière entre le documentaire et l’art.
Quels photographes vous inspirent ?
Ils sont nombreux. Je conserve un dossier où je glisse des images qui m’inspirent pour retenir le nom de leurs auteurs. Il y a ces grands classiques qui ont forgé ma passion de l’image tels qu’Avedon, Mosse, Hido ou Kander. Plus récemment, j’y ai ajouté Julien Chatelin, Spencer Murphy mais aussi de la mode avec Louie Banks.