Le photographe de Tendance Floue, Alain Willaume, dévoile ses préférences au concours photo FOGGY. Le jury a sélectionné ses 3 lauréats. Il nous a fait l’honneur de partager ses impressions face aux images choisies.
1er prix : Sylvie Léger avec « Les docks »
Une énigme habite cette image. Les zones de flou définissent l’espace, donnent sa dimension. Rien n’est vraiment droit, tout un peu bancal. Dans la lumière laiteuse qui baigne l’étrange architecture, un plongeur, songeur, hésite. Il s’apprête peut-être à sauter dans l’eau aussi trouble que la lumière. Des badauds l’observent. On ne comprend pas tout. On doute de l’échelle des personnages, du lieu, du pourquoi de la scène. C’est la force de quelques images : elles posent des questions, ne prétendent pas les résoudre, au contraire, elles s’adressent à l’imaginaire, elles ont plusieurs issues. Cela peut s’appeler de la poésie.
2ème prix : L’Oré des bois avec « A la mer… »
Quoi de plus apparemment étranger à la notion de brume qu’une plage sous le soleil. Cette image parvient à réunir ces deux contraires dans une douce harmonie chromatique. Malgré cette douceur, une menace sourde, à peine perceptible, nimbe l’image. Seuls, deux personnages, curieusement les plus à droite, semblent attentifs à ce
rideau diaphane qui monte du fond de l’horizon : une femme et son landau, et un homme en culotte courte, comme retranché derrière le rempart dérisoire de son petit château de sable. Attendent-ils de devenir invisibles ? Autre paradoxe bienvenu : malgré le caractère naturellement aléatoire d’une foule, celle-ci semble comme rangée par le démiurge photographe attentif à la composition de son image.
3ème prix : Nurak avec « What else »
La nature-morte d’une attente impossible. Une tasse de café, un journal témoignent tous deux d’un quotidien banal. Pourtant, tout est chamboulé par cette grande trace rouge, comme pulvérisée, qui vient ébranler avec violence la tranquillité de cette scène de comptoir. Les rectangles noirs, intrusifs, plaqués au hasard sur la droite de l’image, augmentent la confusion. La buée sale de la vitrine complète l’évidence des indices : il ne faut pas, on ne doit pas, voir au dehors ! Il m’a fallu du temps pour finalement réussir à décoder l’image et passer de l’autre côté du miroir. Mais je ne dirai rien de plus…
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– « 93, plus que jamais » (un travail réalisé par Alain Willaume)