LA RENAISSANCE REVUE ET PHOTOGRAPHIÉE PAR SACHA GOLDBERGER !

par Wipplay
© Sacha Goldberger
© Sacha Goldberger

Pour sa 4ème édition, Lille3000 explore le thème de la RENAISSANCE, à travers le regard d’artistes contemporains. Pour l’occasion, Sacha Goldberger expose 6 tirages extraits de son projet « Super Flemish ». Cette série de portraits – présentée pour la première fois en 2014 – mêle l’univers des super-héros de Marvel, Warner, Disney ou Stars-Wars, avec l’atmosphère picturale des maîtres flamands du XVIème siècle.
À l’occasion d’un bel échange, Sacha nous a livré quelques anecdotes sur cette surprenante série. La rencontre avait lieu chez Mamika, la célébrissime grand-mère du photographe. Ô surprise, les murs de l’appartement sont décorés par de nombreuses toiles d’inspiration hollandaise. Juste au-dessus de Sacha, des petits anges potelés proches de ceux de Rubens n’ont rien manqué de la conversation.

© Sacha Goldberger

Plus de 100 personnes pour réaliser « Super Flemish ».

La série des Super Flemish représente 3 ans de travail, depuis les premiers castings jusqu’à la post-prod’. Plus de 100 personnes ont travaillé sur le projet. Sur le plateau, les corps de métiers sont nombreux : maquilleuses, coiffeuses, couturières, décorateurs, model maker, techniciens lumière… “J’ai une équipe complète qui a bossé sur ce projet. Moi, je ne suis que l’instigateur de l’idée. Et quand tu vois tout cela se mettre en place, c’est absolument magique“.

© Sacha Goldberger

Les jours de production, le plateau se transforme en un monde merveilleux et farfelu. Dans les couloirs, Darkvador se balade aux côtés de Batman et Alice. Pendant que l’on coiffe Blanche-Neige, Hulk est au maquillage. Tout cela prend un temps fou mais le résultat est là. Venus des studios alentours, les curieux se prennent en photos aux côtés des Flemish Heros. Tous les selfies pris dans ces moments-là seront d’ailleurs bloqués par Sacha. Confidentialité oblige.
S’emparer de la grâce du chat

© Sacha Goldberger

Catwoman est le premier personnage de la série. La comédienne choisie dispose de la plastique associée au personnage : une silhouette de mannequin, un visage aux traits fins, des yeux de chat évidemment… « La première photo, c’est toujours un truc un peu particulier car elle va donner l’humeur de toute la série. » Quelle doit être l’attitude d’une Catwoman née au XVIe siècle en Europe ? Le photographe s’est énormément documenté sur la production artistique de l’époque. Fasciné par les portraits de l’Ecole Flamande, il s’inspire de ces figures imposantes et fragiles à la fois.

Avec Catwoman, Sacha doit capturer ce qui n’est encore qu’une idée. Il se rappelle les premières prises : « Elle était très belle mais je sentais qu’elle devait aller plus loin. » Après les premiers essais, un dresseur vient placer le chat sur le plateau. Dans le silence du studio, une confiance s’instaure progressivement entre l’actrice et l’animal. « Le chat s’est collé à elle. Ils ont commencé cette danse tous les deux… Et là, tu sens que ça part. Tout d’un coup, tu vois dans ton objectif des trucs que tu avais imaginés, mais à peine espérés. Je voulais des choses un peu perdues, mais de là à voir cette grâce. » Lorsque Sacha appuie sur le boitier, il sait que la série vient de trouver son âme.

« Je voulais un Hulk sensible et vulnérable. »

© Sacha Goldberger

Pour le portrait de Hulk, Sacha engage un comédien idéalement profilé. Après quatre heures de maquillage (incluant la pose d’un faux front, d’une perruque et des sourcils fabriqués pour l’occasion), l’homme se présente face à l’objectif. Équipé de tous ses muscles verts, il incarne le monstre à la perfection. « Ses veines ressortaient partout. Il était fantastique, j’avais Hulk en face de moi. Mais je ne voulais pas un super-héros américain d’aujourd’hui, déguisé à la mode du XVIe siècle. Je voulais un héros né dans l’Europe du XVIe siècle. »

Sacha laisse toujours un espace d’interprétation aux comédiens. Après leur avoir raconté grossièrement l’histoire, c’est à eux d’incarner le personnage. Anticiper la direction des comédiens pourrait priver le photographe de belles surprises. En revanche, si l’inspiration ne vient pas, Sacha les accompagne.

Ainsi, il éloigne Hulk de son expression première, trop attendue, en l’orientant vers une expression plus profonde, presque dépressive. Progressivement, le modèle ne pense plus à faire ressortir ses veines. Devenu sensible, vulnérable, il regarde par terre. Tout comme les figures pensives des portraits de la Renaissance flamande, son visage adouci se teinte de mélancolie. C’est bien là, l’humeur de la série.

© Sacha Goldberger

À la fin de l’entretien, Sacha nous confie que certains des Super Flemish décorent son propre appartement. « En fait, je me dis que j’ai réussi mon boulot lorsque je veux avoir l’image chez moi. » Loin du nombrilisme démesuré d’un créateur collectionnant ses propres œuvres, Sacha avoue simplement être conquis par les personnages. Il prend d’ailleurs soin de préciser : « Toutes ces images appartiennent à l’équipe : aux costumiers, aux maquilleurs, aux coiffeurs, aux retoucheurs, aux assistants… Elles ne m’appartiennent pas. »