Christophe Hargoues
François, 55 ans, Chambre 36 - Aile I. Arrivé en 1989, François est le doyen de la résidence. C’est un sportif : la sarbacane, la boccia, et par dessus tout le foot fauteuil.
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Une résidence immense, à l’écart de toute commune, parcourue d’un dédale de couloirs bordé d’amples baies vitrées. C’est là que sont accueillies quarante-cinq personnes et que travaillent plus d’une centaine d’autres. Médecins, infirmiers, aides-soignants encadrent les résidents, tous atteints de maladies neuromusculaires dégénératives ; parmi ceux-ci, certains sont là depuis peu, d’autres depuis plus de vingt ans… Au sein de ces quelques mille mètres de couloirs, les aides-soignantes se déplacent à vélo ; les résidents, eux, ajustés dans leurs fauteuils roulants électriques vont et viennent posément. Chacun d’entre eux possède sa propre pièce : son cocon, son univers ; concentré d’images, de souvenirs, de passions. Le silence y est prédominant, la parole, elle, est rendue parfois difficile, voire impossible par la maladie et sa lente évolution. La dépendance est omniprésente, et le dénouement connu. C’est un monde à part, où la perception du temps et de l’espace est altérée, transformée : tantôt comprimée, tantôt distendue. Resituée dans leur chambre médicalisée, cette représentation photographique est tout d’abord l’expression d’une passion révélée, d’une vérité cachée ou tout simplement d’un souhait. Une fois retenue, cette évocation occupe tout l’espace physique de la pièce ; elle l’envahit littéralement afin d’aboutir à une vision où l’imaginaire et l’illusoire supplantent la condition humaine et le tangible.